Respire

J’ai pris mon temps pour écrire ces mots, des mots que j’ai trop souvent voulu refouler, par peur de les voir, écrits noir sur blanc, de les lire à haute voix. J’avais peur parce que je n’avais aucune confiance en moi, aucune confiance en mes sentiments. J’avais peur d’écrire que ça allait mieux, que je respirais mieux, dormais mieux, vivais mieux, parce que j’étais guérie. Je ne voulais pas le dire, par peur qu’on abîme ce que je m’étais donnée tant de mal à réparer. 

Ce n’est pas entre mes lignes que vous allez trouver le fameux mode d’emploi pour se remettre d’une relation amoureuse, car il n’existe pas, j’ai eu beau retourner tous les livres du rayon développement personnel, tous les forums, sites internet, avis divers et variés. Se soigner d’une rupture amoureuse est propre à chacun. 

Aïe, je viens de donner un grand coup de pied dans les pseudos méthodes miracles pour oublier son ex en 7 jours. Comment répare-t-on un coeur brisé ? Certainement pas avec un pot de glace, ni avec un plan cul et encore moins avec une bouteille d’alcool. Je n’ai pas médité, je n’ai pas commencé le yoga, ni la boxe, j’ai seulement accepté ce qui m’arrivait. J’ai accepté cette vague de douleur, je l’ai appréhendée, aussi brutale qu’elle soit, j’ai essayé de la décortiquer dans tous les sens, de comprendre pourquoi elle était là et comment elle pouvait devenir mon alliée plutôt que mon ennemie. 

Mais malgré les meilleures intentions l’humain aime parfois se faire du mal et encore plus à notre époque, une torture 2.0. On vit dans une vitrine, on peut faire croire ce que l’on veut à qui veut bien le voir. Alors on devient petit à petit des stalkers, on s’invente une identité et comme protégé on se faufile pour savoir ce qu’il fait, avec qui il est, où il est. Je ne vous apprendrais rien si je vous disais que c’est malsain, pas vrai ? Mais c’est humain, nous ne sommes pas tous des forces sur-mentales, l’humain cède à la tentation et cela depuis la nuit des temps. Alors, je ne dirais pas qu’il est normal de stalker votre ex, je dirais simplement que c’est humain. J’ai menti pendant longtemps, assurant à qui voulait bien l’entendre  que je ne connaissais plus rien de sa vie, parce que j’avais honte. Honte d’être encore folle de lui, honte de ne pas être aussi forte que lui. Honte d’être faible. Mais n’ayons pas honte, je l’aimais et je souffrais, à ce moment précis j’avais besoin de voir ce qu’il faisait. Mais évidemment c’est une torture gratuite, vous ne faites plus partie de tout ça, de ces 15 secondes figées dans cette story, ces 15 secondes que vous regardez en boucle, 15 secondes qui ne vous appartiennent pas. Quittez cette page, supprimez ce faux compte et concentrez-vous sur votre vie, vivez, montez des projets, échouez, recommencez, mais ne vous enfermez pas dans ce cercle vicieux. J’ai gagné des milliers de 15 secondes à me concentrer sur mes projets, j’ai pris ce temps pour me soigner.

Je n’ai pas beaucoup pleuré, le dégoût et la haine faisaient barrière à ces larmes, qui plus d’une fois ont voulu s’échapper. La haine était là pour me rappeler à quel point je me suis noyée dans  l’amour, elle était là pour me rappeler que j’ai donné corps et âme. 

Le dégoût, lui, a fait barrière à mes tortures nocturnes, mes pensées, mes questions sans réponses, mes incertitudes et le manque. Le dégoût a tout épongé. 

Je n’ai jamais refoulé ce que je ressentais, je n’ai jamais eu honte de dire que je souffrais, je n’ai pas eu honte de vouloir croiser son regard, d’entendre le son de sa voix encore une fois, je n’avais pas honte car j’acceptais tout ce qu’il se passait. J’ai accueilli cette douleur les bras ouverts, comme résiliée, mais pas abattue. J’avais envie de me battre, pas contre moi mais pour moi. Je ne me suis jamais autant donnée d’amour que pendant cette période douloureuse. 

Le bonheur se trouve parfois dans les détails, j’ai appris à convertir toutes les pensées que je lui accordais, elles sont devenues miennes. Au lieu de penser à lui, je pensais à moi. Je suis devenue égoïste, j’ai repris mon amour et ma sincérité pour les donner à la personne qui le méritait le plus, moi. 

Et le pansement dans tout ça ? Quelle fausse idée… Une plaie ne cicatrise jamais mieux qu’à l’air libre. Ne jouez pas avec le coeur d’autrui, personne n’a le droit de payer pour les erreurs d’un autre. Il est vrai que parfois, ce système fonctionne sans douleurs de part et d’autre, mais concentrez vous. On n’entame pas une autre cigarette alors que la première ne s’est pas encore consumée. Ne vous étouffez pas. 

J’ai refusé de me donner à n’importe qui pour oublier plus vite, plus facilement ou pour me prouver quoi que ce soit. Non, je ne me suis pas enfermée à double tour chez moi, j’ai continué à avoir une vie sociale bien remplie, j’ai souri aux compliments des hommes, j’ai accepté des verres, des dîners, mais jamais plus. J’ai refusé de me refermer, de devenir un coeur de pierre et de fuir l’amour. Pourquoi on se ferme après une rupture ? Parce qu’on a été trompé, humilié, sali, alors on a peur de revivre ça, peur parce qu’on n’ a pas assez confiance en nous. Peur, parce qu’on ne se croit pas capable de distinguer le vrai du faux, le bon du mal. Tout ça par la responsabilité d’une seule personne ? Tout ça à cause des vulgaires actes d’autrui ?

Je l’ai aimé de tout mon coeur, mais son emprise devait prendre fin. Il était hors de question que je me refuse d’aimer une autre personne par sa faute.

 Encore une fois un deuil amoureux est propre à chacun. Qui a la prétention de dire qu’il détient la solution ? Certainement pas moi. Mais j’ai touché le mot, il fallait que je l’écrive ici ou ailleurs, il devait se trouver entre ces lignes, le Deuil.

 Ce mot me dérange, il m’a mise mal à l’aise pendant longtemps, m’a fait peur aussi, car je l’ai trop souvent associé au deuil auquel j’avais dû faire face suite au décès de ma mère. Une douleur indescriptible, des étapes qui m’ont arraché le coeur et une acceptation que je n’arrivais pas à percevoir.

J’ai eu peur de faire ce deuil, car une partie de moi avait peur de l’oublier, peur d’accepter que j’ai aimé mais que je n’aimerais plus. Le deuil était le point final, il ne m’embrasserait plus jamais, je ne me glisserais plus entre ses bras, je ne pourrais plus jamais m’endormir à ses côtés. Mais le deuil c’est aussi une majuscule, la première lettre de cette nouvelle histoire qui m’attendait quelque part. 

J’ai commencé mon deuil bien avant de m’en apercevoir, il n’a pas attendu mon feu vert pour s’enclencher, comme une bouée de sauvetage il a amorti la chute. Le deuil comporte 5 phases, imperceptibles pendant son processus.

La première phase c’est le choc, j’ai vécu cette première phase sans le savoir. Je suis restée enfermée plusieurs jours, j’étais dans le déni, comme si au fond je m’y attendais mais je ne voulais pas y croire, pas cette fois, pas encore une fois. 

La seconde phase c’est la colère, ma vieille amie, elle s’est réveillée et m’a étouffée. Je n’étais plus raisonnable, j’étais en colère, j’étais haineuse. Je ne maîtrisais ni mes mots, ni mes gestes. Je détestais la terre entière part la faute d’un seul homme. 

Ensuite vient la négociation, je me suis découverte vicieuse et manipulatrice à mon propre égard. J’ai écrit des lignes et des lignes, des mots qui ne sont jamais arrivés à destination. J’ai provoqué des situations, j’ai imaginé toutes sortes de scénarios. J’ai retourné l’histoire dans tous les sens, essayant de trouver une solution, ça ne se terminerait pas comme ça, impossible. Et pourtant, il n’y avait pas meilleur point final. 

Dépression et douleur, la quatrième phase est sans doute la plus longue. Mais pendant combien de temps souffre-t-on ? Google n’a jamais donné de réponse à ma question. La porte est restée close pendant plusieurs jours, j’ai refusé leur intrusion et j’ai fini par céder. 

J’ai décidé de ne plus être spectatrice de ce cataclysme, accepter pour agir. La douleur ne sera jamais agréable, mais l’appréhender c’est éviter les dommages collatéraux, elle ne m’a pas prise par surprise, je l’attendais. Elle s’est parfois matérialisée pour essayer de me tromper, mais je ne l’ai jamais perdue de vue. Elle est restée là pendant quelques semaines. Elle a pris son temps, je ne l’ai pas repoussée, je lui ai même fait de la place et quand elle était rassasiée et qu’il n’y avait plus rien à prendre, elle s’est doucement dissoute.

Et quand je m’y attendais le moins, quand j’avais la sensation de ne plus rien ressentir, d’être vide de tout sentiment, ils sont revenus à nouveaux, les papillons. Je n’avais plus peur, plus de regret, plus de colère, plus de douleur. Tout était derrière moi et mon présent était là devant moi, mon coeur prêt à donner à nouveau. 

C’était le point final, l’acceptation. 

Je n’ai jamais regardé derrière moi, pour la première fois je me replonge dans mes souvenirs, je vois cette histoire défiler, mais je n’ai plus de haine, je n’ai plus mal, je ne ressens plus rien, je souris en me rappelant ma naïveté. J’aurais eu encore tant de choses à lui dire, mais mes mots sont trop précieux, je n’ai aucune frustration, la vie est bien faite. La douleur en valait la peine. 

Et dans tout ça, l’amour disparaît-il ? Cette personne qu’on a aimée à s’en torturer ? Tout cet amour, que devient-il ? Ces questions restent sans réponse, je suppose qu’il flottera toujours quelque part, je ne veux pas l’enterrer ni le jeter, l’amour est si précieux, il ne mérite pas d’être mal traité. Mon passé tient une place importante dans ma vie, et je ne peux renier celui-ci, je m’efforce simplement de le laisser derrière et de ne pas me retourner, il est là et parfois avant de m’endormir il me chuchote dans l’oreille, mais je n’y cède pas. 

Alors il y en aura d’autres, des déceptions amoureuses, la vie est ainsi faite, l’amour et ses vagues ne me font plus peur, je n’appréhende pas la suite, j’ai hâte et j’aime à nouveau.

Vous êtes capable, c’est vous en premier. 

Droit devant vous et jamais derrière vous. 

1 Comment

  1. Incroyable tes mots 😭 tristes et beaux a la fois.
    « Le temps guéri les blessures » et il faut parfois accepter qu’il n’y a rien à faire qu’attendre.
    Il y a quelques années après une séparation houleuse je marchais dans la rue et d’un coup j’ai réalisé « j’arrive à vivre sans lui » j’étais si fière de moi

    Aimé par 1 personne

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